Au crépuscule de l’année 2017, ce dernier et ses sociétés sont sanctionnés par le Trésor américain. Quand la créance arrive à échéance, la Gécamines refuse de la payer. Pour cause, la dette est réclamée par la société Ventora qui se présente comme appartenant à Dan Gertler, en remplacement de la société Fleurette Mumi ! Aujourd’hui, la Gécamines dit qu’elle n’est pas prête à payer cet argent à Ventora malgré le jugement rendu le 14 novembre par le Tribunal de Commerce de Lubumbashi qui a donné gain de cause à la société de Dan Gertler. Ngele Masudi Déogratias, secrétaire général de la Gécamines : «Nous avons dit que nous ne pouvions pas payer du fait que cette entreprise était sous sanction américaine».
Pour la petite histoire
S’exprimant sur ce sujet à travers un communiqué de presse, Jacques Kamenga Tshimuanga, Directeur Général a.i. de la Gécamines a déclaré que ce contrat existe et a effectivement été exécuté dans les normes.
Cependant, il a démenti formellement toutes les allégations diffusées au sujet du prêt de 200 millions d’euros. Dans ce communiqué, il a précisé que pendant qu’elle n’était pas sous sanction américaine, Fleurette Mumi, devenue Ventora depuis lors, avait octroyé à la Gécamines, en octobre 2017, un prêt de 200.000.000 € (Deux cents millions d’euros). Il était prévu que la Gécamines pourra retirer les sommes dont elle aurait besoin sans dépasser le maximum de 200.000.000 €. Et de poursuivre qu’en exécution dudit prêt, la somme de 128.000.000 € (Cent vingt-huit millions d’euros) avait été sollicitée et finalement perçue par la Gécamines en octobre 2017. Cette créance est arrivée à échéance en avril 2018.
Pour la Gécamines, les traces de ce montant existent sur swift, extrait bancaire et sur les documents comptables. A ce sujet, précise la source de la Gécamines, les extraits des comptes et autres documents comptables renseignent clairement que la quasi-totalité a été versée au Trésor public au titre de paiement d’avances sur fiscalité. En témoigne, la lettre du Ministre des Finances portant titrisation de cette somme. De celle-ci, le solde a été conservé au compte de la Gécamines pour son fonds de roulement en vue de la production et du fonctionnement.
Par sa lettre n° 901/DG/19 datée du 28 septembre 2019, la Gécamines a signifié à l’ entreprise Ventora que, malgré la certitude, la liquidité et l’exigibilité de sa dette, elle se trouvait devant un obstacle majeur et raisonnablement infranchissable pour la payer et ce, en raison du Global MagnitskyAct des Etats-Unis d’Amérique sur base duquel a été décrété l’Exécutive Ordre 13818 contre ces derniers. Cela à l’issue de la mise en demeure de Ventora en date du 4 septembre 2019. Face à cette situation, la Gécamines affirme avoir sollicité l’avis de ses conseils (y compris un Cabinet américain). Ces derniers ont fermement conseillé la Gécamines de n’effectuer aucun paiement en raison des sanctions économiques frappant le créancier depuis décembre 2017 et pouvant s’étendre à la Gécamines en cas de paiement. Face à ce dilemme, Ventura a initié en date du 15 octobre 2019, une procédure d’injonction à l’endroit de la Gécamines de payer, par contrainte, la somme de 151.881.175,96 €.
Par l’ordonnance n°308/ AMCM/10/2019 portant décision d’injonction de payer rendue à la date du 15 octobre 2019, le Président du Tribunal de Commerce de Lubumbashi a fait droit à la requête de Ventora en enjoignant la Gécamines de payer la somme susmentionnée. Refusant tout paiement, la Gécamines a introduit en date du 29 octobre 2019, une opposition à la décision portant injonction de payer avec assignation auprès du Tribunal de Commerce de Lubumbashi. L’affaire a été plaidée le 11 novembre 2019, à en croire le communiqué de presse de la Gécamines.
Selon la même source, le jugement RAC 2478 rendu le 14 novembre 2019 par le Tribunal de Commerce de Lubumbashi a partiellement donné gain de cause à Ventora en lui reconnaissant la créance principale et les intérêts (151.881.175,96 euros au total), mais en rejetant sa demande de dommages-intérêts. A ce jour, la Gécamines n’a effectué aucun paiement, a fait savoir Jacques Kamenga dans son communiqué d’information.
Malgré l’allure qu’avait prise cette affaire, la Gécamines a reconnu sa dette, mais en relevant que l’exercice de la procédure des défenses à exécuter a été tant inefficace qu’abusive et susceptible d’amener la partie adverse à exercer une action en dommages-intérêts contre elle.
Ventora a pratiqué une saisie attribution visant la créance de Gécamines sur l’Etat congolais. La Gécamines en a été informée par acte de dénonciation et aucune suite n’a été portée à sa connaissance depuis lors. En tout état de cause, la Gécamines n’a effectué aucun paiement.
En date du 21 novembre 2019, la Gécamines a interjeté appel contre ce jugement pour mal jugé et a notifié la date de l’audience du 29 novembre 2019. Dans l’attente de l’arrêt de la Cour d’Appel, l’affaire a fait irruption dans les médias quand, en séjour à Kinshasa, le Directeur Général et le Secrétaire Général de la Gécamines se trouvant déjà à l’aéroport de N’djili dans l’attente de l’avion pour Lubumbashi, ont été informés par un officiel de la DGM qu’une instruction leur interdisait de voyager ce jour c’est-à-dire en date du 17 décembre 2019 et qu’ils étaient attendus par le Directeur Général de la DGM à ses bureaux.
Deux jours plus tard, ils recevront une invitation du Parquet Général près la Cour d’appel de Kinshasa / Gombe. Sur le même dossier, le Directeur financier de la Gécamines a été auditionné au Parquet Général et a fourni toute la documentation demandée.
Pour la Gécamines, on est donc bien loin du contrat prétendument fictif, de la somme non perçue par la Gécamines, du non-enregistrement de la somme dans ses états financiers, de la somme détournée, des fausses arrestations et des fausses fuites.
Bien que le Président de la République, à travers un communiqué, se soit dit intéressé par ce dossier, sur lequel il enjoint la justice à faire toute la lumière en lui demandant d’appliquer la rigueur de la loi, la Gécamines ne se voit pas empêtrée. De son droit, elle a tenu à éclairer l’opinion tant nationale qu’internationale à travers un communiqué qui explique les contours de ce dossier.
Pour une autre tendance, il s’agirait là d’ un combat d’arrière-garde que mèneraient certains industriels miniers opposés à la révision du code minier dont Albert Yuma Mulimbi, le président du Conseil d’ administration de la Gécamines a été le grand artisan. Si telle est la vérité qui se murmure, derrière cette affaire pourrait donc se dissimuler une lutte impitoyable pour le contrôle des ressources naturelles de la RDC par certaines multinationales. Mais pour la société civile, la Gécamines ne devrait même pas reconnaître devoir quoi que ce soit à Ventora étant donné que ce n’est pas avec elle qu’elle avait signé le contrat de prêt. C’est l’avis de Georges Kapiamba, président de l’Association congolaise pour l’accès à la justice (Acaj) : « Aussi longtemps que la Gécamines ne dépose pas formellement de plainte contre Ventora pour tentative d’escroquerie, nous considérons que les dirigeants actuels de la Gécamines restent dans leur option de contribuer à cette entente pour blanchir ces capitaux.»
Dossier à suivre
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